mercredi 15 juillet 2009

EMERSON, LAKE & PALMER : EMERSON, LAKE & PALMER

Les idées reçues ont la vie dure. L'une d'elle voudrais que le rock progressif soit prétentieux. Mais entre gens raisonnables soyons francs : peut on vraiment affirmer une telle bêtise. Non bien sur, le rock progressif a toujours été raffiné, léger, subtil, racé...Hum...Reprenons...L'auteur de ces lignes serait ravi de pouvoir écrire de telles choses, seulement voila, si je le faisais je deviendrais aussi mythomane que le genre que je tend à présenter est prétentieux. Avec le recul de l'année 2009 les choses apparaissent clairement : le prog étais, par définition, pétri d'orgueil, boursouflé, froid, bref, tout ce dont n'importe quelle musique populaire tend à s'éloigner. Mais de tout les groupes de Art Rock (puisque ils était de bon ton de les nommer ainsi), combien pouvais se vanter d'être aussi prétentieux qu'Emerson, Lake & Palmer ?
La réponse est simple : aucun. Même Yes et leurs compositions pétries d'orgueil n'arrivaient pas à la cheville du trio ELP. Tenez, rien que par son statut ELP étais prétentieux : un "supergroupe", et puis quoi encore ? Pour les non-initiés qui s'interrogeraient sur la signification de ce terme barbare voila un exemple des plus représentatifs. Issu en droite ligne des inégaux Nice où il pratiquaient déjà la reprise assassine et la torture de claviers, j'ai nommé Keith Emerson : clavier émérite, doigts fins, grosse tête. A sa suite, le magicien des cordes, que ce soient celles d'une guitare, d'une basse, ou qu'elles soient vocales. L'émissaire du Roi Pourpre : Greg Lake. Et pour finir le génie précoce des futs. A seulement 19 ans il quitte les Atomic Rooster pour rejoindre Emerson et Lake. La boucle est bouclée : voila Carl Palmer.
Donc voila, un supergroupe c'est la réunion de plusieurs musiciens ayant déjà fait leur preuves dans differents groupes à succès (bien qu'aujourd'hui personne ne parle plus des Nice ou même d'Atomic Rooster.) Enfin on parle, on parle, mais voila notre trio sous les feux des projecteurs d'une communauté de fans dans l'expectative, de critiques prétes à ouvrir les hostilités, et de quelques passants venus voir ce qui se passait. Et pour couronner le tout le quatrième membre du supergroupe est aux abonnés absents. Un certain Hendrix qui vient de leur faire faut bond en s'étouffant dans son vomi...Du coup au lieu de HELP les voila réduits à trois misérables initiales plutôt ringardes : ELP

Et enfin l'attente des fans est récompensé : le premier album éponyme d'Emerson, Lake & Palmer sort en Novembre 70 sous une belle pochette semi abstraite où on distingue une colombe (symbole de pureté et de légèreté parait il, enfin on évitera les commentaires sur ce point là...) sur fond verdâtre...
Quand à ce qui se trouve à l'intérieur qu'en dire ? C'est prétentieux, boursouflé, parfois insipide, parfois gonflant...Oui il y a tous ça dans Emerson, Lake & Palmer, oui mais pourtant c'est pas mal...Pas mal du tout même. On oserais même dire que le disque est bon... Pourquoi ? C'est simple, prenez le morceau d'ouverture "The Barbarian" : jamais morceau n'aura été mieux placé que celui ci. Une intro lente, presque Sabbathienne, lourdement influencé par le hard rock naissant, un riff ultra saturé, un accompagnement agressif comme seul Keith Emerson sait en faire. "The Barbarian" tape fort et ouvre Emerson, Lake & Palmer sous les meilleurs augures. Et on est pas déçus même si le ton change : "Take A Pebble" oscille entre rythmes jazzy et mélodies classiques, porté par la voix majestueuse de Greg Lake puis se termine en sympathique accords folk à jouer autour du feu. Le resultat est probant, on se laisse aisément porter par les lignes mélodiques dépaysantes de Keith Emerson même si on ne peut pas s'empêcher d'avoir l'impression qu'il les a piqués chez quelques compositeurs classiques tombés dans les limbes de l'oubli. On en oublierai presque l'orgueil pur que dégage l'album en quantité comparable à la radioactivité qui émanerait d'un bloc d'uranium enrichi de plusieurs tonnes. Vient alors "Knife Edge", sa ligne vocale vaguement monotone, néanmoins sympathique, son orgue presque joyeux (il en deviendrait presque agaçant,) et ses mélodies piqués discrètement à Bach et à Janáček... Puis vient l'inévitable suite en trois mouvement qui ouvre la deuxième face. "The Three Fates" fait retomber la magie des trois premiers morceaux et nous remet devant la prétention sans limite de Keith Emerson martyrisant son orgue et lui tirant de vains vagissements dénués d'intérêts. On se trainent péniblement jusqu'à "Tank" qui redonne cette dimension sympathique qui semblait avoir été perdue dans "The Three Fates". On posera une seule et unique question : "le solo de batterie était il réellement indispensable...? Enfin, on finis avec le morceau le plus conventionnel de l'album, celui que tout le monde retiendra (les autres étant bien trop compliqués pour restés imprimés dans le cortex) : "Lucky Man" est un folk chaleureux qu'on ne peut qu'apprécier après ce déluge technique qui fait mal à la tête

Enfin, c'étais écris depuis le départ : "Comment épelez vous prétentieux ? ELP..." Keith Emerson, Greg Lake et Carl Palmer étais nés pour incarner l'orgueil, le grand guignol et les debordements musicaux à travers ELP. Mais bon sang ! C'est bien ça qu'on aiment chez eux non ?

Note : ***

Liste des morceaux :

1. The Barbarian
2. Take A Pebble
3. Knife Edge
4. The Three Fates
I) Clotho
II) Lachesis
III) Atropos
5. Tank
6. Lucky Man

Du même artiste :

Vous allez aimer :
- Tarkus
- Trilogy

A éviter :
- Love Beach
- Brain Salad Surgery

ALCOHSONIC : SONGS FROM THE DELIRIUM TREMENS WORLD

Le rock se meurt, c'est pas nouveau. En fait le rock se meurt depuis le premier disque d'Elvis. C'est à dire depuis sa création. Comme dirait l'autre : "la vie est une maladie sexuellement transmissible et toujours mortelle" il en va de même pour le rock.
C'est donc un fait établit : tout autour de la planète les gloires se fanent en usant leurs vieux succès jusqu'à la moelle tandis que les jeunes prometteurs se mangent la tête première dans le sable en glissant sur la banane de l'ambition. Et pour ceux qui réussiraient à contourner habilement l'obstacle on ne peut prévoir, au mieux, qu'une combustion spontanée par trop prématurée (Cobain, Buckley, Curtis...Les exemples ne manquent pas), au pire une vie d'ermite reclus et incompris des mélomanes de son temps car se démarquant outrancièrement des canons esthétiques de son époque. On dis de ces même artistes quelques décennies plus tard qu'ils étaient des génies et qu'on aurais peut être du faire quelque chose pour qu'ils évitent de finir la cervelle réduite à l'état de bouillie par leur propre main. Enfin trop tard c'est trop tard.
Mais alors que la cause semble perdue (mais comme on l'a déjà dis elle est perdue depuis sa prime jeunesse) on peut encore espérer un petit quelque chose du petit hexagone français. Oh bien sur le rock n'est pas totalement nouveau au sein de cette petite communauté d'attardé musicales gouverné par la varietoche ringarde et le folklore aussi pesant qu'une pizza à la tartiflette. On essayera d'oublier les années 60 et son quintal de groupes yéyé incroyablement pénibles à l'époque, incroyablement ringards aujourd'hui (tout en restant passablement pénible, bien quel leur passage sur les ondes reste heureusement limité,) emmené par l'increvable Johnny Hallyday (qui, hélas, continue à sévir aujourd'hui.) Puis on aura les années 70, destructrices pour les anglo-saxons, salvatrice pour la France : Magma, Ange, Alan Stivell, Gong, Manset, malgré les suréstimés Polnareff et Gainsbourg... Puis viennent les années 80 et leur lot de groupes punk et metal pour le meilleur (Métal Urbain, Starshooter,) mais aussi pour le pire (Trust.) Les années 90 nous donnent Noir Désir, et pour finir, les années 2000 seront le règne des épuisants baby-rocker (BB Brunes, Naast, Plastiscines, etc) à peu prés aussi superficiels que dépourvus de talent.
En 40 ans la liste est maigre, voire même anorexique, alors si il y a un pays où le rock ne peut pas mourir c'est bien la France. En vérité le rock français n'est jamais vraiment né.
Malgré tout, entre la techno festive de David Guetta et les vagissements des BB Brunes on peut ésperer une bouffée d'air frais : Alcohsonic.
Autant le dire tout de suite : Alcohsonic n'invente rien. En fait la joyeuse bande a même tout piqué : de Led Zeppelin aux Black Crowes en passant par Black Sabbath la liste est longue. Mais loin de produire un sous produit de tout ces grands noms de la guitare crade qui frappe là où ça fait mal, Alcohsonic remet le tout au gout du jour. Une remasterisation en import si vous préférez. Le groupe utilise un prétexte bidon pour enchainer les riffs libérateur oscillant entre pure Rock'N'Roll ("Mojo Driver" sonnerait presque comme les Eagles Of Death Metal), Stoner ("Stoned Morning" pas loin des QOTSA) , et hard rock (le morceau d'ouverture "Follow Me, I'll Flee From You" quelque part entre Black Sabbath et Led Zeppelin avec son riff contagieux et ses hurlement décérébrés.) Ici on ne parle même pas de concept album (malgré l'intro et le contexte trés Daevid Allenien : il existe un monde lointain qu'on ne peut percevoir qu'a travers un flasque de vodka vide.) L'intro bien délirante (le petit gnome prononce t'il welcome ou vodka ? Le mystère reste entier...) ne sert qu'a donner le ton à ce monde de brute. Le second degré est présent jusque sur la pochette du disque (les quatres membres du groupe visiblement biens faits chevauchent un éléphant rose,) où la grande question demeure : "le zeppelin en arrière plan est il là par hasard...? Quoiqu'il en soit le resultat est explosif : un déluge de riffs ultra jouissifs ("Follow Me, I'll Flee From You", "Spam Me", "I'm Your Man", "You're Not Rock n' Roll"), une ballade musclée (il en faut bien une) "Stoned Morning", un instrumental psychédéliques aux sonorités orientales qui n'est pas sans rapeller les meilleurs moments du Chocolate Watchband. Le résultat est tellement jouissif qu'on ne peut qu'avoir la même réaction que le dormeur de la fin du disque : Déjà fini ? On a encore soif...

Note : ****

Liste des morceaux :

1. Enter The Delirium
2. Follow Me I'll Flee From You
3. Mojo Driver
4. Stoned Morning
5. Hanuman Chest
6. Spam Me
7. I'm Your Man
8. The Cathodic Way Of Life
9. You're Not Rock' n'Roll
10. Delirium Song

Du même artiste :

Songs From The Delirium Tremens World est pour l'instant le seul disque d'Alcohsonic, on éspère qu'il ne restera pas le seul.

HEAVEN AND HELL: THE DEVIL YOU KNOW


P’tit blind test ? Allez. Dans le rôle du pizzaïolo, j’enfourne la galette déjà pâteuse dans son four stellaire (cf Ponge), sélectionne le thermostat 11 et frôle la touche lecture. Les premières convulsions de la pâte ne laissent aucun doute aux concurrents... D’humeur frétillante, ils ne manquent de se délester de leur dignité pour hurler "Black Sabbath" dès que sonne le glas de l’intro titanesque de Vinny Appice. Aaaah, sacrés esthètes culinaires ! Cette cuisson terriblement XXIème ne cache néanmoins pas une recette vieille comme Brillat-Savarin : le riff grave, distordu, attention-c’est-chaud, et, euh, sataniste, du cuistot Tony Iommi, assaisonné de la quatre-cordes relevée de Geezer Butler, le tout laissé à un minuteur lent. Avec en prime, la patte dégueulasse de celui que certains, sous eau bénite sans doute, prirent à tort pour le plus grand chef du restau, j’ai nommé Frère Ronnie James Dio. Parce qu’alors que ce dernier se contente de faire son job (et quelques tonnes au passage), le regretté Ozzy l’était... Mais, ne réveillons pas cette querelle séculaire, vous aurez aisément capté, à la lecture de ces lignes, que le maître queu(x)(e) du metal sataniste n’est pas ici en odeur de sainteté. Même si l’on peut concéder à ses cordes vocales cet exploit d’être, comme les manuscrits de la mer morte, arrivées jusqu’à nous à peu près intactes.

"Alors, quel album ? On dirait Heaven And Hell... A moins que ce soit Mob Rules ou l’ignoble Dehumanizer" ? Continueront les compétiteurs déroutés, en citant toutes les collaborations du clerc à la messe noire. On leur comptera le point, parce que, vous l’aurez deviné, le fameux Heaven And Hell, c’est Black Sabbath. En plus d’être un nom qui en jette un peu plus que "Black Sabbath", "Heaven And Hell" est un cache-sexe pour une formation qui tente tant bien que mal d’éviter les attaques en justice du sataniste chéri de la couronne. Comme le dit Iommi, récemment traîné devant les tribunaux par le Raspoutine briton, "Ozzy est mon ami. On se parle encore de temps en temps."

Après cet intermède cocasse, il sied de traiter de l’objet en lui-même. Que voulez-vous savoir que les operibus précédents n’ont déjà dit ? Voyons... La production caverneuse et profonde façon Dimmu Borgir (en mieux, tout de même, on est bien d’accord) de la lente Atom And Evil est la seule chose qui la sépare de l’antédiluvienne Sweet Leaf ; sur "Fear", on dénote l’un des multiples excellents riffs de l’album ; la caricature Bible Black est, elle, à jeter incontinent aux oubliettes, sauf pour qui est d’humeur gausseuse... On pourrait continuer ce descriptif si l’oeuvre n’était pas aussi longue et l’exercice aussi inutile, car tout ce qu’il faut retenir est dans ces trois mots : Rien de neuf. Pour quoi faire, alors ?

A l’heure du bilan-synthèse supposé apporter une réponse satisfaisante à cette interrogation légitime, déjà, l’on voit s’approcher la foule des progressistes, avant-gardistes, mort-aux-vieux-istes et visionnaires de tout crin, bâillant devant cet effort redondant. C’est sans doute vrai, à quoi bon se délecter de voir une bande de vioques sortir cet énième sosie de Master Of Reality ? La criiiiise vous aurait donc laissé tant d’espèces, pour qu’un modeste rédacteur de webzine vous invite à cottiser pour la caisse retraite des doom-métalleux ? La réponse est simple : même dans un monde qui n’est pas le leur (2009), nos vétérans ne trouveront pas mieux. "Mais il y a le dernier Mastodon !" Certes, mais un album par an ne tarira pas la disette stylistique dont souffre le metal. Qui aujourd’hui donne un coup de pied au cul au genre, dont le mainstream tourne au concours de "c’est qui qui pisse le plus loin" ? (Transposé à l’âge "mature" sous le nom plus accorte de "c’est qui qui fait le plus de bruit ?") Le bourratif Metal symphonique ou lyrique (Ohééé, Cradle Of Filth, Nightwish, vous m’entendez ?) dont les kids désaxés sont si friands ? Non, et on vous le dit tout de suite : ça peut user, à force, d’écouter Soulfly, Dragonforce, Satyricon, Cavalera Conspiracy, Immortal, Slipknot, leurs doubles grosses caisses martelées façon machine à écrire, leurs vagissements insoutenables, leurs guitares inaudibles... Mes chers petits headbangers, au lieu de perdre son temps à écouter tous ces zozos faire du Cannibal Corpse, vaut mieux perdre son temps à écouter Black Sabbath faire... Du Black Sabbath. C’est plus sain.
Note: ***
Liste des pistes:
Atom and Evil – 5:15
Fear – 4:48
Bible Black – 6:29
Double the Pain – 5:25
Rock and Roll Angel – 6:25
The Turn of the Screw – 5:02
Eating the Cannibals – 3:37
Follow the Tears – 6:12
Neverwhere – 4:35
Breaking Into Heaven– 6:53
Du même artiste (Black Sabbath)
Vous allez aimer:
-Black Sabbath
-Paranoid
-Master Of Reality
-Sabbath Bloody Sabbath
-Heaven And Hell
A éviter:
-Mob Rules
-Dehumanizer
-Never Say Die!
Egalement sur http://inside-rock.fr

mardi 14 juillet 2009

NEIL YOUNG & CRAZY HORSE : RUST NEVER SLEEPS


Il y a plusieurs vérités qu'on ne peut pas démentir sur le loner. La première est que Neil Young est un des artistes les plus importants et les plus influents de son époque : A l'époque où nous planterons le décor de cet article, Neil Young a réussi à aligner un nombre impressionnant de chef d'œuvres. Rien qu'en solo on peut déjà en faire une liste respectable : After The Gold Rush en 70, Harvest en 72, On The Beach en 74, ou encore Tonight's The Night en 75. Quand à ses collaborations, ses piges ou encore ses participations à des groupes aussi influents que le Buffalo Springfield, Crosby, Still & Nash, et son groupe de tournée, le Crazy Horse, on ne les comptent plus. C'est simple. En 79, le Loner, pareille au roi Midas, transforme tout ce qu'il touche en or.
Une autre vérité indéniable sur Neil Young est que l'homme aime les hommages, mais aimeraient bien ne pas avoir trop à en faire. Si on en avais déjà un aperçu avec le poignant "The Needle And The Damage Done" présent dès 72 sur Harvest (le folkeux canadien y évoquait les ravages de l'héroïne et composait un remarquable poème imprêgné de la disparition de Dany Whitten guitariste du crazy horse, emporté par cette dernière.) Tonight's The Night, sortira en 75 et de nouveau Neil Young nous ouvrira les portes de son intimité pour nous parler du regretté Bruce Berry et rajouter deux ou trois mots sympathiques pour Dany Whitten.

Mais en 79 le loner est en mauvaise posture : le punk arrive sur le rock comme une déferlante furieuse détruisant tout sur son passage. Le prog y est déjà passé depuis quelques années. Un a un les grands tombent : Led Zeppelin coule, emporté par les problèmes de drogue de Jimmy Page. Les Stones, on préfère ne pas en parler tellement le ridicule les submergent. Bob Dylan devient chrétien et perd sa verve par la même occasion. Neil Young, lui, sais que ce raz de marée finira par le toucher. Le loner entreprend alors la seule chose sensée qu'il lui soit encore possible de faire : une transformation brutale pour s'adapter à son temps. Cette mutation elle s'effectue en un album : Rust Never Sleeps.

Et déjà les questions fusent : est-ce un live ou un album studio ? Pourquoi ce parallèle acoustique/électrique ? Quel rôle tiennent "My My, Hey Hey (Out Of The Blue)" et son célebrissime jumeau "Hey Hey, My My (Into The Black)" ? Ca veut dire quoi Rust Never Sleeps ?
Patience, patience. Chaque chose en son temps. Pour commencer, oui Rust Never Sleeps est un live. Mais ici aucun "Heart Of Gold" en vue : Neil Young enregistre son nouvel album live et s'arrange pour faire disparaitre les applaudissements au mixage. En définitive on obtient le même résultat qu'un album studio mais avec une profondeur de son digne du célèbre Live/Dead des Grateful Dead (une décennie plus tôt, rien à voir donc avec l'oeuvre du Loner.)
Maintenant un des points phares de ce disques : ici, Neil Young joue une première partie acoustique qui résume bien ses productions des dernières années (le mélancolique "Trasher", le "Ride My Llama" qui semble sortir directement du folklore canadien, "Sail Away" et ses faux airs de "Heart Of Gold".) Puis soudainement, sans prévenir, un peu comme Dylan au festival de Newport en 67, le loner adopte son nouveau surnom : le parrain du grunge, en décochant quatre morceaux d'une intensité électrique rarement entendue. Accompagné de son groupe fétiche, le Crazy Horse, Neil Young achéve sa métamorphise sans pour autant renier ses origines. Les trois dernières pistes relèvent même du hard rock le plus pure : "Welfare Mothers "emprunte à ce dernier un riff à la limite de l'aphrodisiaque pendant que le parrain du grunge s'excite derrière son micro. "Sedan Delivery" est lancé à vitesse grand V sur la guitare acérée de Frank Sampedro sur une autoroute qui nous emmène à la conclusion de l'album : "Hey Hey, My My".
N'importe quelle attardé amateur de Lady GaGa doté d'une paire de neurones (disons aux moins deux paires, ils pourront jouer à la belote,) fais le parallèle entre ce dernier et le morceau d'ouverture "My My, Hey Hey". L'explication est simple : les deux morceaux sont jumeaux, le premier correspond à la carrière que Neil Young a derrière lui. Quand au deuxième c'est un cri d'espoir. "Si il faut changer pour continuer, je changerais" semble affirmer Neil Young le poing levé, "Changer est la clé, car le rouille ne dort jamais" : rust never sleeps...
Une dernière question que vous avez du vous posez : pourquoi avoir parlé des hommages qu'a rendu Neil Young ? Peut être pour ces simple vers énigmatiques que sont le troisième couplet de "Hey Hey, My My" :

"The king is gone but he's not forgotten
Is this the story of johnny rotten?
It's better to burn out 'cause rust never sleeps
The king is gone but he's not forgotten."

Ce couplet, Neil Young l'adresse aux nouveaux, à Johnny Rotten qui a préféré tout foutre en l'air avant de devenir une énième rock-star faisant son dernier tour de piste. Il vaut mieux bruler que rouiller..."It's better to burn out 'cause rust never sleeps", ce vert sera repris par Kurt Cobain sur un message d'adieu une vingtaine d'année plus tard, vraisemblablement griffonné juste avant de se faire sauter la cervelle. Accablé par un horrible sentiment de culpabilité (Kurt Cobain était trés proche du Loner,) Neil Young écrira "Fallen Angel" en hommage a l'énigmatique leader de Nirvana. Mais ça c'est une autre histoire...

Note : *****

Liste des morceaux :

1. My My, Hey Hey (Out Of The Blue)
2. Trasher
3. Ride My Llama
4. Pocahontas
5. Sail Away
6. Powderfinger
7. Welfare Mothers
8. Sedan Delivery
9. Hey Hey, My My (Into The Black)

Du même artiste :

Vous allez aimer :
- Everybody Knows This Is Nowhere
- After The Gold Rush
- Harvest
- Zuma
- Tonight's The Night
- Chrome Dream II

A éviter :
- Are You Passionate
- Trans
- Arc

HAWKWIND : HALL OF THE MOUNTAIN GRILL


Rendons à Caesar ce qui est à Caesar : En trois albums d'une qualité et d'une violence rarement atteinte, Hawkwind étais bien placé, en 1974, pour briser d'une poigne de fer le trépied Genesis/Yes/ELP qui faisait tenir en équilibre le rock progressif au point culminant de l'attention des foules. Mais faut il qu'on rappele ô combien précaire est cet équilibre en 74 : Rick Wakeman et ses copains continuent joyeusement leurs belles démonstrations techniques sur The Relayer, balayant en quelques notes de moog prétentieu leur belle jeunesse (The Yes Album, Fragile, Close To The Edge.) C'est pas si dramatique me dirais vous : Tales Of The Topographic Oceans s'en était déjà occupé. Emerson, Lake & Palmer se trouvent tout contents de pondre l'inbouffable Brain Salad Surgery (puis tomberont quatre douloureuses années plus tard dans le ringard le plus total avec Love Beach.) Les offusqués me rappeleront surement que la même année Genesis sort le superbe The Lamb Lies Down On Broadway. Tout ça est tout ce qu'il y a de plus véridique. A un détail prés : le chef d'œuvre de Peter Gabriel est tout sauf progressif. Non, le seul vrai chef d'oeuvre de la musique progressive en ces temps obscurs c'est l'incomparable Red du Roi Pourpre. Quel ironie, le groupe qui a ouvert la porte au genre est également celui qui a pour dure tache de la refermer.

Tout ça, les joyeux Hawklords n'en on strictement rien à foutre. Hawkwind fait partie de ces groupes qui dés le départ on adopté la philosophie : "Pas d'ambition, on veut juste faire du bruit."
Alors la chute de tout ces groupes de musique menés par des Freud chef pâtissier, on peut comprendre que Lemy et sa bande s'en tamponnent le coquillage. A vrai dire il est déjà assez difficile de faire assimiler à ses homo-sapiens interstellaires attardés le principe même du prog, alors quand à leur faire comprendre qu'il en sont le fer de lance...

Nous voila donc en cette triste année 1974 avec la quatrième galette des Hawklords. Celle qui dois faire passer leurs rock primaire et cosmique à la prospérité, et qui dois enfin corriger cette idée reçue qui veut que ce soit Pink Floyd qui ait inventé le Space Rock avec Meddle.
Seulement, Dave Brock a décidé de prendre de bonnes résolutions pour l'année 74. La première semble avoir été d'arrêter la défonce. Bien dommage. La deuxième devais être un truc comme "Les mecs ! si on faisais comme les autres groupes de rock progressif !". Très regrettable.
Le résultat : le ton a considérablement baissé depuis leur précédente galette (un des meilleurs live jamais enregistré : Space Ritual.) L'apparition d'un musicien à formation classique (beurk !) spécialiste du Mellotron (un troisième synthétiseur était il vraiment nécessaire...?) et violoniste virtuose (re-beurk !) : Simon House. L'ensemble est mou, chiant, emphatique par moment (ce putain de violon à la con sur Wind Of Change !) L'ennui atteint son apogée sur la piste finale : "Goat Willow" et ses vagues sonorités orientales. Et ce n'est pas le sympathique jeu de mot du titre de l'album, "Hall Of The Mountain Grill", qui va nous sauver du morceau de piano chiantissime du même nom.

Mais comme il a été précisé au début de cet article : "rendons à Caesar ce qui est à Caesar." : Hall Of The Mountain Grill nous offre quand même de bons, voire très bons, moments. A commencer par le morceau d'ouverture qui ,contrairement à celui qui donne le point final au disque, est une de ces explosion d'énergie dont Hawkwind garde jalousement le secret. On aura aussi le droit au superbe "You'd Better Believe It" malgré son ouverture digne des pires albums de Klaus Schulze. Une expérience plus floydienne : "D-Rider" nous renvoie aux meilleurs moments de In Search Of Space...Quand ce putain de violoniste n'étais pas encore là... (Même si il laisse sa trace sur le même morceau la voix envoutante de Dave Brock sauve les meubles.) Quand à Lemy Kilmister, il signe ici sa dernière pige avant de se faire virer pour consomation d'amphétamine : "Lost Johnny", un sympathique blues cosmique que ne renierait ni Johnny Cash ni Amon Düül II.

Aprés un certaine prise de recule, Hall Of The Mountain Grill apparait comme un bon album. Mais un album qui aurais eu une place de choix dans la discographie de groupes de prog mineurs comme Gentle Giant ou Camel. De la part de ceux qui se feront désormais appelés les Psychedelic Warlords, on étais en droit d'attendre un chef d'œuvre.

Note : **1/2

Liste des morceaux :

  1. The Psychedelic Warlords (Disappear In Smoke)
  2. Wind of Change
  3. D-Rider
  4. Web Weaver
  5. You'd Better Believe It
  6. Hall of the Mountain Grill
  7. Lost Johnny
  8. Goat Willow
Du même artiste :

Vous allez aimer :
- Hawkwind
- In Search Of Space
- Doremi Fasola Tido
- Space Ritual

A éviter :
Tout à partir de Hall Of The Mountain Grill