samedi 1 octobre 2011

THIS IMMORTAL COIL : THE DARK AGE OF LOVE


"This album is dedicaced to the memory of John Balance & the living musical genious of Sleazy, and to all the dreamers still asleep."

The Dark Age of Love, c'est avant tout un hommage à Coil, duo du milieu des années 80 -jusqu'en 2004 tout de même, connus et reconnus pour leur folie créative, leur originalité et surtout leur sensibilité dans leurs actes musicaux. Les douze artistes (ou groupes artistiques) de This Immortal Coil honorent ainsi la mémoire de John Balance, décédé il y a sept ans. Il leur faudra cinq ans pour reprendre à leur manière onze de leurs morceaux, sans paraphraser l'oeuvre de Coil ni en perdre l'esprit. Un défi de taille, qui paraîtrait ambitieux si les musiciens participant au projet n'étaient déjà réputés dans le milieu. De grands noms ou formations tels que Matt Elliott, Bonnie "Prince" Billy ou Crazy Oktopus figurent sur l'affiche. Enfin, en septembre 2010, l'album voit le jour. Peter Christopherson donna alors un avis très positif sur le résultat. Il décèdera un an plus tard.

Tâche ardue, il a fallu choisir, pour This Immortal Coil, un nombre réduit de morceaux à reprendre au sein d'un nombre incalculables d'albums et d'essais musicaux. Leur choix s'est porté sur des titres musicalement compréhensibles, et relativement aisés d'écoute, bien souvent parmi les plus célèbres du groupe.

Les morceaux de Coil sont fréquemment emprunts d'une certaine violence, pas nécessairement audible, mais camouflée, au second plan, provoquant un sentiment de malaise à travers de subtiles ruptures harmoniques. The Dark Age of Love, au contraire, fait couler la mélodie avec douceur, et surtout avec simplicité. les morceaux sont réduits à leur essence. Le premier titre éponyme est bercé par la voix de Yaël Naim (on est bien loin des "Dix Commandements" !), sur fond plus éthéré mais aussi plus harmonieux que l'original. La chanteuse va remanier la voix de Balance, alors plutôt rêche, dans une interprétation de The Dark Age of Love, et de Tattoed Man plus caressante, satinée.

Red Queen est probablement l'une des reprises les plus remarquables du disque. Qui aurait cru que ce morceau, au piano anarchique, opposant simultanément une harmonie et une disharmonie parfaite, puisse-t-être réinterprété de façon si mémorable ? L'aspect nerveux du piano est occulté, ainsi que le désespoir perceptible dans le chant de Balance. Une fois encore, la douceur est le mot d'ordre, toute la fébrilité de l'oeuvre originale est oubliée, le calme et la tranquillité dominent l'atmosphère. Une vision fascinante d'un morceau déjà sublime, projetée dans cette reprise qui présente un aspect nouveau du titre.

Les autres morceaux ont été traités de la même manière. Ostia, complètement angoissant dans sa première version, n'est que légèrement agité dans la nouvelle. A l'instar de Teenage Lightning (qui fait ici presque plus Elliott que Coil...), de Tattoed Man, même de Love Secret Domain, titre initialement hyperactif, le coeur et l'impulsion mélodique ont été conservés, une façon magique de ne laisser apparaître que le beau dans Coil. Cette épuration évite de pâlottes tentatives de recréer la profondeur et la complexité des morceaux initiaux, acte totalement dénué de sens face à la qualité de ces compositions marquées par l'improvisation et la sensibilité du moment. Il fallait donc essayer de faire ressortir autre chose de l'oeuvre de Coil, n'en garder que l'élégance et l'enchantement. Une véritable gageure, donc, relevée avec succès par ces nombreux musiciens.

A noter une vraie rupture, néanmoins, avec Blood From the Air. L'aspect complètement anarchique du morceau a été conservé, mais il a en contrepartie été rendu plus... musical. Si l'original était presque noyé dans le bruit, la reprise est presque mélodique. Une performance à la hauteur des attentes... Le disque se termine sur une ballade inattendue sur le thème de Love Secret Domain (baptisée Outro LSD) assez courte, chantée par Matt Elliott, s'il vous plaît. Une fin toute en douceur, et le titre est clôturé sur une note agréable.

The Dark Age of Love n'a pas la prétention d'égaler les productions de Coil, que ce soit d'un point de vue technique ou artistique, mais témoigne d'un grand respect envers l'oeuvre de John Balance et de Peter Christopherson à travers un hommage en à la fois simple et sensible, peut-être dans une volonté d'immortaliser la réussite artistique des deux musiciens.