lundi 6 juin 2011

Godspeed you ! Black Emperor : Lift Your Skinny Fists Like Antennas to Heaven


Vous aimez le violon ? Les morceaux à rallonge de plus de vingt minutes ? Avec des titres de la taille d'une phrase ? Alors vous apprécierez Godspeed You ! Black Emperor, l'une des formations clef du Post-Rock, genre voluptueux de notre ère. Si d'aucuns considèrent qu'il ne s'agit que d'une infâme bouillie répétitive, insipide qui plus est, d'autre sauront apprécier à leur juste valeur (ou fausse, pourquoi pas) ces mélodies rythmées et touffues. Le label ? Constellation, celui auquel adhère tout Post-Rockeux qui se respecte. On peut au moins leur accorder une chose : leurs pochettes ont souvent la classe...

Quatre morceaux. Le disque se condense en (seulement) quatre petites pistes d'à peine vingt minutes chacune. On peut déjà crier au scandale, quand on sait que les morceaux, dans le milieu, atteignent aisément les quarantes minutes sans dérider. Ce qui a tendance à se rider, en revanche, ce sont les visages des auditeurs qui, les yeux fermés, montrent leur fascination/ennui pour le groupe par une concentration intense. Le premier morceau de Lift Your Skinny Fists Like Antennas to Heaven (le beau copier/coller), par exemple, met trois bonnes minutes à démarrer. Mais une fois lancé, c'est l'extase, avec l'union des cordes frottées avec enthousiasme, du synthé jouissif, de percus pas complexes mais jubilatoires et (cerise sur le gâteau) une pointe de cuivre qui se met doucement en valeur... Le gros cake au chocolat (it's a lie) s'achève presque dans un accord orgasmique, qui sied bien à une fin de morceau. Mais nous parlons de Post Rock, et ce-dernier n'a débuté que cinq minutes auparavant. La deuxième facette de Godspeed you ! Black Emperor, plus représentative que la première, se dévoile couche par couche. La dernière pelure d'oignon tombée révèle la suite.

Car Godspeed you !, c'est surtout des nappes et des nappes qui s'étalent sur de longues distances, presque un fond sonore permanent, animé par une batterie quasiment tribale, une osmose instrumentale parfois difficile à appréhender. L'ensemble s'accorde autour de la rythmique, qui décide réellement du ton des morceaux, dans une lente progression qui explique leur taille krautrockienne. C'est un concept souvent repris par les autres groupes du même mouvement, Silver Mont Zion (bon, ok, c'est presque le même groupe, et alors ???) ou encore Rien pour citer quelques exemples. On peut parfois noter un léger rapport au drone, et autres musiques passablement expérimentales de la même période. Mais il serait injuste de s'arrêter à cette qualification, péjorative dans certaines bouches, pour caractériser Godspeed You ! Black Emperor. Si des extraits sont en effet plus des expérimentations musicales que des réalisations mélodiques à proprement parler - une partie du deuxième morceau fait presque néofolk -, leur musique demeure principalement un condensé de guitare à pédales, de synthé acéré et de mélodies répétitives violonniques. A noter le lourd impact de la basse qui ajoute à la dimension rythmique de leur univers.

Le résultat ? Un son agréable et dense, par moment tendus, hypnotique. C'est la grande force de GY!BE. Que l'on aime ou que l'on déteste, l'esprit est contraint de suivre le mouvement du pendule. Dans les passages les plus... lents... bizarres... Allez, chiants, les oreilles sont décontractées. Quand la tendance s'accélère, nieriez-vous que vous êtes contractés comme un pendu près de sa corde ? La comparaison est merdique mais explicite.

En définitive, que penser de Lift Your Skinny Fists Like Antennas to Heaven ? Un disque remarquablement mené du début à la fin, parfois très simple, presque nu, mais réalisé avec beaucoup de sensibilité. Une très belle pochette - facteur important dans l'achat d'un disque - qui correspond bien à l'atmosphère un peu contemplative de l'album. Ceux qui le trouvent chiant, qu'ils aillent se faire un concert de drone. C'est épique.