samedi 1 octobre 2011

THIS IMMORTAL COIL : THE DARK AGE OF LOVE


"This album is dedicaced to the memory of John Balance & the living musical genious of Sleazy, and to all the dreamers still asleep."

The Dark Age of Love, c'est avant tout un hommage à Coil, duo du milieu des années 80 -jusqu'en 2004 tout de même, connus et reconnus pour leur folie créative, leur originalité et surtout leur sensibilité dans leurs actes musicaux. Les douze artistes (ou groupes artistiques) de This Immortal Coil honorent ainsi la mémoire de John Balance, décédé il y a sept ans. Il leur faudra cinq ans pour reprendre à leur manière onze de leurs morceaux, sans paraphraser l'oeuvre de Coil ni en perdre l'esprit. Un défi de taille, qui paraîtrait ambitieux si les musiciens participant au projet n'étaient déjà réputés dans le milieu. De grands noms ou formations tels que Matt Elliott, Bonnie "Prince" Billy ou Crazy Oktopus figurent sur l'affiche. Enfin, en septembre 2010, l'album voit le jour. Peter Christopherson donna alors un avis très positif sur le résultat. Il décèdera un an plus tard.

Tâche ardue, il a fallu choisir, pour This Immortal Coil, un nombre réduit de morceaux à reprendre au sein d'un nombre incalculables d'albums et d'essais musicaux. Leur choix s'est porté sur des titres musicalement compréhensibles, et relativement aisés d'écoute, bien souvent parmi les plus célèbres du groupe.

Les morceaux de Coil sont fréquemment emprunts d'une certaine violence, pas nécessairement audible, mais camouflée, au second plan, provoquant un sentiment de malaise à travers de subtiles ruptures harmoniques. The Dark Age of Love, au contraire, fait couler la mélodie avec douceur, et surtout avec simplicité. les morceaux sont réduits à leur essence. Le premier titre éponyme est bercé par la voix de Yaël Naim (on est bien loin des "Dix Commandements" !), sur fond plus éthéré mais aussi plus harmonieux que l'original. La chanteuse va remanier la voix de Balance, alors plutôt rêche, dans une interprétation de The Dark Age of Love, et de Tattoed Man plus caressante, satinée.

Red Queen est probablement l'une des reprises les plus remarquables du disque. Qui aurait cru que ce morceau, au piano anarchique, opposant simultanément une harmonie et une disharmonie parfaite, puisse-t-être réinterprété de façon si mémorable ? L'aspect nerveux du piano est occulté, ainsi que le désespoir perceptible dans le chant de Balance. Une fois encore, la douceur est le mot d'ordre, toute la fébrilité de l'oeuvre originale est oubliée, le calme et la tranquillité dominent l'atmosphère. Une vision fascinante d'un morceau déjà sublime, projetée dans cette reprise qui présente un aspect nouveau du titre.

Les autres morceaux ont été traités de la même manière. Ostia, complètement angoissant dans sa première version, n'est que légèrement agité dans la nouvelle. A l'instar de Teenage Lightning (qui fait ici presque plus Elliott que Coil...), de Tattoed Man, même de Love Secret Domain, titre initialement hyperactif, le coeur et l'impulsion mélodique ont été conservés, une façon magique de ne laisser apparaître que le beau dans Coil. Cette épuration évite de pâlottes tentatives de recréer la profondeur et la complexité des morceaux initiaux, acte totalement dénué de sens face à la qualité de ces compositions marquées par l'improvisation et la sensibilité du moment. Il fallait donc essayer de faire ressortir autre chose de l'oeuvre de Coil, n'en garder que l'élégance et l'enchantement. Une véritable gageure, donc, relevée avec succès par ces nombreux musiciens.

A noter une vraie rupture, néanmoins, avec Blood From the Air. L'aspect complètement anarchique du morceau a été conservé, mais il a en contrepartie été rendu plus... musical. Si l'original était presque noyé dans le bruit, la reprise est presque mélodique. Une performance à la hauteur des attentes... Le disque se termine sur une ballade inattendue sur le thème de Love Secret Domain (baptisée Outro LSD) assez courte, chantée par Matt Elliott, s'il vous plaît. Une fin toute en douceur, et le titre est clôturé sur une note agréable.

The Dark Age of Love n'a pas la prétention d'égaler les productions de Coil, que ce soit d'un point de vue technique ou artistique, mais témoigne d'un grand respect envers l'oeuvre de John Balance et de Peter Christopherson à travers un hommage en à la fois simple et sensible, peut-être dans une volonté d'immortaliser la réussite artistique des deux musiciens.

lundi 6 juin 2011

Godspeed you ! Black Emperor : Lift Your Skinny Fists Like Antennas to Heaven


Vous aimez le violon ? Les morceaux à rallonge de plus de vingt minutes ? Avec des titres de la taille d'une phrase ? Alors vous apprécierez Godspeed You ! Black Emperor, l'une des formations clef du Post-Rock, genre voluptueux de notre ère. Si d'aucuns considèrent qu'il ne s'agit que d'une infâme bouillie répétitive, insipide qui plus est, d'autre sauront apprécier à leur juste valeur (ou fausse, pourquoi pas) ces mélodies rythmées et touffues. Le label ? Constellation, celui auquel adhère tout Post-Rockeux qui se respecte. On peut au moins leur accorder une chose : leurs pochettes ont souvent la classe...

Quatre morceaux. Le disque se condense en (seulement) quatre petites pistes d'à peine vingt minutes chacune. On peut déjà crier au scandale, quand on sait que les morceaux, dans le milieu, atteignent aisément les quarantes minutes sans dérider. Ce qui a tendance à se rider, en revanche, ce sont les visages des auditeurs qui, les yeux fermés, montrent leur fascination/ennui pour le groupe par une concentration intense. Le premier morceau de Lift Your Skinny Fists Like Antennas to Heaven (le beau copier/coller), par exemple, met trois bonnes minutes à démarrer. Mais une fois lancé, c'est l'extase, avec l'union des cordes frottées avec enthousiasme, du synthé jouissif, de percus pas complexes mais jubilatoires et (cerise sur le gâteau) une pointe de cuivre qui se met doucement en valeur... Le gros cake au chocolat (it's a lie) s'achève presque dans un accord orgasmique, qui sied bien à une fin de morceau. Mais nous parlons de Post Rock, et ce-dernier n'a débuté que cinq minutes auparavant. La deuxième facette de Godspeed you ! Black Emperor, plus représentative que la première, se dévoile couche par couche. La dernière pelure d'oignon tombée révèle la suite.

Car Godspeed you !, c'est surtout des nappes et des nappes qui s'étalent sur de longues distances, presque un fond sonore permanent, animé par une batterie quasiment tribale, une osmose instrumentale parfois difficile à appréhender. L'ensemble s'accorde autour de la rythmique, qui décide réellement du ton des morceaux, dans une lente progression qui explique leur taille krautrockienne. C'est un concept souvent repris par les autres groupes du même mouvement, Silver Mont Zion (bon, ok, c'est presque le même groupe, et alors ???) ou encore Rien pour citer quelques exemples. On peut parfois noter un léger rapport au drone, et autres musiques passablement expérimentales de la même période. Mais il serait injuste de s'arrêter à cette qualification, péjorative dans certaines bouches, pour caractériser Godspeed You ! Black Emperor. Si des extraits sont en effet plus des expérimentations musicales que des réalisations mélodiques à proprement parler - une partie du deuxième morceau fait presque néofolk -, leur musique demeure principalement un condensé de guitare à pédales, de synthé acéré et de mélodies répétitives violonniques. A noter le lourd impact de la basse qui ajoute à la dimension rythmique de leur univers.

Le résultat ? Un son agréable et dense, par moment tendus, hypnotique. C'est la grande force de GY!BE. Que l'on aime ou que l'on déteste, l'esprit est contraint de suivre le mouvement du pendule. Dans les passages les plus... lents... bizarres... Allez, chiants, les oreilles sont décontractées. Quand la tendance s'accélère, nieriez-vous que vous êtes contractés comme un pendu près de sa corde ? La comparaison est merdique mais explicite.

En définitive, que penser de Lift Your Skinny Fists Like Antennas to Heaven ? Un disque remarquablement mené du début à la fin, parfois très simple, presque nu, mais réalisé avec beaucoup de sensibilité. Une très belle pochette - facteur important dans l'achat d'un disque - qui correspond bien à l'atmosphère un peu contemplative de l'album. Ceux qui le trouvent chiant, qu'ils aillent se faire un concert de drone. C'est épique.

jeudi 28 avril 2011

The Inspector Cluzo : The French Bastards


Japon, 2010. Comme pour chaque semaine, un classement des meilleures ventes nationales a lieu. En ce mois de Mai torride, la première place est attribuée à Lady Gaga, sans trop de surprise pour les fans. Mais en second vient un disque d'une formation française inconnue : The Inspector Cluzo avec The French Bastards, du rock un poil bourrin provenant du pays du coq et du fromage. Le WTF a du surprendre bon nombre de nippons amateurs de leur pop kitshouille nationale, qui fait la fierté du pays du soleil levant, mais plus encore Laurent Lacrouts et Mathieu Jourdain, la paire de fauteurs de trouble à l'origine du groupe. Ils sont deux musiciens aux tripes bien accrochées, batterie, guitare, strict minimum mais qui envoie plus dans le bide que le pâté de votre belle mère.

Suite à une introduction instrumentale violente, métallique et jazzy tout à la fois, le disque démarre avec énergie par le clou du spectacle, The French Bastards, morceau dynamique peu flatteur mais si enflammé que les injures sont oubliées au fur et à mesure qu'elles sont proférées. De toutes façons, leur mode de pensée se détermine assez facilement. The Inspector Cluzo détestent Michael Jackson, les français en général, Michael Jackson, les connards de musiciens qui utilisent des séquences honteuses, le monde entier et par dessus tout les bassistes, entités musicales aussi inutiles qu'hérétiques qui ne devraient même pas exister.

Le point fort du groupe est sa grande variété de styles qu'il enchaînent avec la même vitalité entêtante. Ainsi, leur musique surfe parfois dans des vagues funky pour passer rapidement dans des tonalités plus métalliques... De même, quand ils "enculent" musicalement Michael Jackson, certains fragments (vocaux) ne seraient probablement pas reniées par l'ex King of Pop au titre si surfait.

Dans les versions studio de leurs morceaux, on pourra remarquer l'appui d'un organiste et parfois d'un bassiste, qui renforcent la dimension assez spectaculaire du groupe. Ils n'avaient malheureusement pas d'useur de platines tueur de zombie, mais on sent aussi un (très) léger appui électronique. Mais pas trop, faut pas déconner avec ça, et The Inspector Cluzo ne sont pas des tapettes.

Pendant quarante-cinq minutes aux pistes chronométrées (on évite de dépasser la barre des 4 minutes, fatale à tout bon morceau de rock), on a le droit à du rock métal funk acéré et tonique, que les acheteurs japonais ont su apprécier dans un instant de lucidité. On mélange le genre avec un guitariste de talent, un batteur violent, beaucoup d'humour et d'autodérision, et on obtient The Inspector Cluzo, une terrine explosive à resservir à tout le monde... Ils adoreront !

mardi 22 mars 2011

CURRENT 93 : SWASTIKAS FOR NODDY


Vous voyez tous ces blockbuster américains, littéralement inondés d'acteurs connus qui montreront leur belle gueule cuivrée pendant une heure quarante ? Eh bien, Swastikas For Noddy, c'est pareil. Au programme, David Tibet, illustre fondateur de Current 93 ; John Balance, défunt membre de Coil ; Rose McDowall (Sorrow, Spell) ; le célèbre Steven Sapleton, en provenance directe de Nurse With Wound ; Pierce Douglas, distingué musicien de Death in June ; ainsi qu'une troupe entière d'inconnus notoires, dont on ne doutera pas de l'excellence du travail. Comme quoi, la musique industriel, ça n'est finalement qu'une seule mais grande famille. Avec un staff pareil, le résultat ne pouvait qu'être au rendez-vous. C'est ainsi que le 9 novembre de l'an de grâce mille neuf cent quatre vingt sept seront enregistrés pas un, ni deux, mais bien dix-sept morceaux, de taille et d'influence variables, qui raviront les connaisseurs.

Pour qualifier l'œuvre de David Tibet, d'aucuns pourraient parler, à tort ou à raison, de néofolk cireux à tendance moyenâgeuse. C'est ainsi que le disque s'ouvre sur un chant a capella qui n'aurait pas fait honte à un certain Grégoire, sous la voix veloutée du fondateur de Current 93. Suite à quelques prometteuses vibrations de cordes vocales, introduction planante à la suite du menu, Swastikas For Nobody débute réellement, presque avec hargne. Le chant gagne en intensité et en agressivité, surpassant l'impassibilité des chœurs et de l'accompagnement des guitaristes, grattant implacablement accord sur accord, comme pour faire fondre, en aide à Tibet, le silence et la sérénité qui semblaient avoir construit leurs bases en début d'album. L'union de ces artistes montre un univers qu'ils ont en commun, et qu'ils tentent - ou non - de partager.

Fidèles aux traditions de la musique industrielle, quelques samples et boîtes à rythme bruitistes - roulements de trains, opérettes lointaines - viennent pimenter par moments la musique habituellement assez standardisée de Tibet. On ressent l'influence de Douglas, Stapleton et McDowall, toujours sur le fond doux et cotonneux introduit par David Tibet. Une fois encore, on observe que les différents univers des musiciens, bien qu'assez éloignés, sont loin d'être indissociables. Néanmoins, on ressent des changements assez nets, bien que progressifs, dans l'évolution de la mélodie. La voix de McDowall apporte ainsi une touche inquiétante dans Black Flower Please, une sorte de ritournelle de l'angoisse qui cèdera le pas à un air tout à fait joyeux. Tout est fait pour bercer l'auditeur dans différents domaines, avec des transitions parfois brutales et surprenantes. A noter, une amusante reprise de The Summer of Love, de Blue Öyster Cult, qui rappellera des souvenirs aux vieux de la vieille...

Le disque atteint son point culminant à son onzième morceau : Beausoleil, huit minutes libératrices et pleines d'humour et de cris de joie. Presque tout le monde y contribue dans la bonne humeur la plus totale. David Tibet laisse derrière lui tout son sérieux, criant toujours plus fort ce mot français avec un accent... so british... On l'a rarement vu aussi détaché de son caractère habituellement posé. Pendant ce temps, chacun reprend le double-mot en chœur et un zouave (l'on pourra soupçonner Balance ou Stapleton - ou même les deux) s'amuse à faire des sons gargouillant bizarres avec un synthé. Un condensé de bonheur béat, qui détendra les nerfs les plus rugueux.

Il ne faut donc pas attendre Swastikas For Noddy comme un album de Current 93, mais plus comme une exceptionnelle collaboration de tous les précurseurs du néofolk, et même de la musique industriel. Libre de toute tension et de toute ligne principale, il fera apparaître des facettes différentes, sous l'influence des différents artistes qui y contribuent, mais sous forme d'un bloc unique, presque magique et plein d'espoir. Aujourd'hui encore, la plupart de ces groupes - bien souvent des one man band - officient encore dans les salles de concerts et dans les bacs indus (un peu plus rare en France, pour notre plus grand malheur), et ce disque, sans être, finalement, vraiment extraordinaire en lui-même, est un bon moyen de tous les appréhender.

vendredi 11 février 2011

ELpH : Zwölf 20' To 2000


En 1999, le label Raster-Norton, qui prend en charge de nombreuses formations électroniques et minimalistes, a organisé un évènement spécial pour le passage au deuxième millénaire. Douze artistes de cette vague ont ainsi tiré des albums de vingt minutes, en édition limitée, au rythme d'un par mois. A chaque fois, même boitier rond et transparent, et même disque translucide décidément peu aisé à ranger convenablement dans une médiathèque. En clôture de ces sorties mensuelles, une grosse claque pour tous les amateurs de bruit et d'ambiant : ELpH (alias Coil) et son unique mais superbe morceau "Zwölf".

Il faut bien reconnaître que dans le milieu de l'expérimental musical, si l'on trouve nombre de titres et de concepts intéressants, une certaine proportion demeurent rigoureusement chiants et seuls des snobinards patentés en vanteront les mérites. C'est en cela que l'ambiant et la noise sont risqués pour un musicien osé. Il peut pondre un morceau original et passionnant aussi bien qu'une bouillie insipide composée d'extraits d'enregistrements fumeux de trains, d'oiseaux ou du bien célèbre cri de l'hippocampe feuillu. Fascinant. Mais John Balance et Peter Christopherson (dont nous pouvons déplorer le récent décès) avaient de l'imagination à revendre, et ont réussi à mettre au point un morceau ni assommant, ni insipide, ni soporifique, mais au contraire un titre captivant qui compte parmi leurs meilleures productions d'ambiant.

Pourtant le disque commence sobrement, à la manière d'à peu près tous les morceaux bruitistes (j'exagère, je sais...), à savoir avec un soufflement continu reposant sur un silence de plomb. Mais le sifflement varie, s'intensifie lentement, pour être rejoint par un rythme très léger. La manœuvre est exécutée d'une main de maître, et dès lors, le bruit devient envoûtant... Une boîte à rythme très légère mais très présente est mise en place, bercée par deux grincements profonds et obscurs qui alternent dans une atmosphère mortelle. De légers cafouillages interviennent par instants dans le rythme, qui poursuit sa course avec une implacabilité effrayante. Elle s'estompe, au profit d'un crissement odieux. Silence, soudain.

On évolue donc dans un univers de peur palpable, de débris d'engins électroniques hors-services et de courtes séquences qui transpercent douloureusement la monotonie du paysage musical. L'ambiance n'est pas froide, mais humide et malsaine. L'image d'un monde apocalyptique en désolation peut transparaître parfois, dans un tremblement qui s'amplifie de plus en plus.

Au milieu du morceau, un revers surprenant a lieu : une boîte à rythme plus traditionnelle prend place dans le maelström tournoyant et menaçant qui sévit dans ce petit album. Mais jamais on ne s'ennuie, plongé(e) dans la torpeur ensorcelante d'ELpH. Enfin, cerise sur le gâteau, le final. Une minute avant la fin démarre dans un soubresaut un orphéon laborieux, musique de cirque ou de dessin animé, ultime reste tremblotant de l'humanité, et Zwölf s'achève dans un accord final de cet orchestre, dans une dernière vibration sonore.

C'est donc par ce morceau que John Balance et Peter Christopherson célèbrent, quelques jours auparavant, le passage à l'an 2000. Ils clôturent admirablement le projet de Raster-Noton (qui recevra l'an suivant le prix
Golden Nica de la part du jury d'Ars Electronica). Si ce disque est représentatif de l'avenir qui nous attend, c'est un futur bien sombre qui nous ouvre ses portes. Sur ces bonnes paroles, je vous le souhaite officiellement avec onze ans de retard : bonne année 2000 !

Liste des morceaux :

1. Zwölf (20.02)

mercredi 9 février 2011

COIL : THE ANGELIC CONVERSATION



"Being your slave, what should I do but tend

Upon the hours and times of your desire?"

Peter Christopherson et John Balhance écoutait Popol Vuh, c'est certain. Comme le groupe de Florian Fricke, Coil avait compris à quel point une bande originale peut s'émanciper du film qu'elle accompagne : à l'instar des musiques qui accompagnaient les films de Werner Herzog dans les années 70, la musique de The Angelic Conversation, long métrage expérimental militant de Dereck Jarman, se passe sans mal des images de ce dernier : elle se suffit à elle-même en tant que musique bien sûr, mais aussi en tant qu'histoire. Une histoire, un conte lent et méditatif où Coil a compris que, plus que les notes, le silence peut se transformer en puissante force évocatrice.

Le silence donc, il baigne l'album entier en fait, ponctué discrètement par des bruits d'eau, d'orage, bruits de pas, clochers d'église discrets... Des instruments il y en, peu certes, mais utilisés de manière judicieuse : envolée céleste de cordes, percussions martiales, timbales rituelles, rien n'est en quantité suffisante pour constituer un morceau, rien n'est jamais vraiment entendu : une tambour frotté, quelque secondes passent, un rêve, rien de plus... Au lieu de faire de la musique, Coil ne fait qu'en parler. Les contours sont dessinés mais l'encre n'est posé que par touche. The Angelic Conversation est un dessin érotique, rien n'est montré, tout n'est que suggestion.

Et puis il y a la voix, Judi Dench en fait, posé, sure d'elle, aussi large que le silence qui l'entoure presque constamment, déclamant posément Shakespeare, jamais trop longtemps, s'éteignant peu à peu, laissant place au silence, aux bruits d'eau, aux instruments, puis au silence à nouveau, étendu à perte de vue.

Quelque années plus tard, Coil écrira Ostia, sans peut être jamais réalisé à quel point The Angelic Conversation en annonçait la couleur : cette maitrise des cordes et du bruitage existait déjà sur ce dernier. A la lumière d'Ostia, The Angelic Conversation apparait comme une version dilatée du meilleur morceau de Coil. Un disque entier de tâtonnement, de recherche, une ébauche laissée comme tel par peur d'en gâcher les esquisses les plus belles.
Le duo se transforme ici : des débuts de Coil, violents et sales, s'élève quelque chose de plus singulier qu'on ne pouvait que supposer à l'écoute de Scatology. La musique industrielle de Coil s'est arrêté et de leurs début ces derniers n'ont gardés que deux morceaux : leur premier effort : "How To Destroy Angels" (car celui-ci était déjà un rituel païen avant d'être une musique), et "At The Heart of It All" (ici renommé Montecute), voyage onirique qui jurait avec la violence organique de Scatology. Coil venait de trouver un filon inexploité alors. Depuis, les deux hommes n'ont cessé creusés profond, très profond...


"To me, fair friend, you never can be old,
For as you were when first your eye I ey'd"

MATT ELLIOTT : DRINKING SONGS


Dans la longue liste des artistes dépressifs et déprimants, Matt Elliott figure très certainement dans la décade de tête. Musicien Folk des années 2000, il se distingue par une patte musicale reconnaissable entre toutes, gorgée de tristesse. Bon, pour faire court, c'est pas le genre de truc qu'on se met pour se fendre la pêche. Aussi déconseillé le matin, sauf si vous vous rendez à un enterrement peu après. De plus, ce disque est à proscrire si vous avez tendance à vous endormir avec une bouteille de pinard dans les bras, même votre médecin vous le fera remarquer. Ces recommandations faites, nous pouvons commencer à décortiquer Drinking Songs, perle des années 2000.

D'entrée de jeu, les premiers arpèges sont annonciateurs d'une musique qui ferait se pendre une corde elle-même. Le thème du suicide est omniprésent, rendu particulièrement glauque par des mélodies qui colleraient parfaitement à l'ambiance des bistrots de Berlin-Est durant la Guerre Froide. Elles sont teintes d'un désespoir amer piqué de tristesse. Les enchaînements d'accords au piano, presque chauds dans un premier temps, finissent par se ternir, se dénuder pour laisser place à un souffle glacé et ardent, faussement suave en apparence mais âcre en vérité. La guitare, elle, continue, imperturbable, sans tenir compte de la profonde rancœur qui l'enveloppe. Rien n'adoucit cette musique obscure, si ce n'est la voix brûlante de Matt Elliott, presque fiévreuse, qui sucre légèrement la détresse des morceaux.

Rien de très joyeux, vous l'aurez compris, mais les sensations qui naissent de ce volume sont dues à un mélange bien dosé, qui a permis la création d'un thème musical repris dans tout le disque avec différentes variations. Cependant, rassurez-vous, il est loin d'être monotone. Simplement, il martèle inlassablement à coups de désespoir mesuré ses mélodies. Tous les moyens sont alors bons : violons découragés et sinueux, ensembles vocaux dignes de l'animation d'un mausolée, arpèges rigoureusement exécutés et un piano en arrière plan mais pourtant très présent, qui vient finaliser le cocon fantomatique de la composition.

On peut noter les passages très calmes du début du dernier morceau, qui font s'émerger d'une longue torpeur vos oreilles délicates qui prévoient déjà de se passer la corde autour du lobe... Ils se distinguent par leur nature posée, aléatoire et discrète, et vont plonger dans une musique de plus en plus rythmique avant de sombrer progressivement dans le bruitisme, dans un chaos grinçant et cafouilleux, pour chuter définitivement dans le nuage blanc et noir caractéristique des écrans hors-service. C'est alors une extase de sons provenant de toutes parts, suivie d'un piano de plus en plus anarchique et d'un lointain reste des mélodies de Matt Elliott, le tout dans une cohésion extraordinaire, malgré la confusion de l'enveloppe sonore.

Un superbe album, donc, déprimant jusqu'à l'os, et qui restera probablement longtemps dans les mémoires. En revanche, coupez le son quand vous passez sur un pont. On ne sait jamais quelle idée pourrait vous passer par la tête...


Liste des morceaux :

1. C.F. Bundy
2. Trying to Explain
3. The Guilty Party
4. What's Wrong
5. The Kursk
6. What the Fuck am I Doing on this Battlefield ?
7. A Waste of Blood
8. The Maid we Messed

vendredi 7 janvier 2011

THE LEGENDARY PINK DOTS : ANY DAY NOW


De la vague New Wave et du mouvement Industriel sont nés de multiples formations, toutes plus ou moins en rapport. Parmi elles, The Legendary Pink Dots, l'une des figures les plus emblématiques du genre, au même titre que Coil, Current 93 ou encore Psychic TV. Ils sont à l'origine de plus de soixante disques, et c'est en 1987 qu'Any Day Now est enregistré à Amsterdam, le groupe s'étant expatrié d'Angleterre trois années auparavant. Maîtres dans l'usage des sons électroniques, spécialistes de la bidouille, ils demeurent des musiciens, et harmonisent leurs morceaux par une instrumentalisation développée, ce qui les rend accessibles à un large public. Ils ont en particulier un excellent claviériste, Phil Knight, alias "The Silverman", qui contribue fortement à la création de leurs enveloppes sonores. Anecdote amusante, le nom de la formation provient de la présence inexpliquée de taches rosâtres sur les touches de son orgue...

C'est d'ailleurs par un son d'orgue que commence l'album, dans une profondeur teintée d'électronique, car ce dernier s'estompe dans un soubresaut étrange, avant d'être remplacé par une séquence piquante qui violence la tranquillité du début du morceau. C'est l'un des grands atouts du groupe : le rythme est régulièrement formé par des enchaînements de sons percutants mais discrets programmés à cet effet. La structure est bercée par les apparitions plus ou moins éthérées des différents instruments, lourdement modifiés afin de créer un ensemble à la fois étrange et fascinant. Chaque phrase musicale masque un abysse mystérieux, et cette tendance générale s'accentue avec la voix torturée d'Edward Ka-Spel, dit "Le prophète". Car, de même que pour les autres formations du mouvement industriel, The Legendary Pink Dots évoluent dans un environnement malsain, qui reste cependant très expérimental. Ce fait provient sans doute en partie de l'influence de Throbbing Gristle et de leurs pratiques jugées obscènes par leurs contemporains. En l'occurrence, l'on peut ressentir cet univers malsain à travers le mal-être qui se dégage de la violence ou même de la douceur faussement apaisée des compositions. Ainsi, le violon langoureux de "The Gallery" n'efface pas les paroles tortueuses qui plongent au final dans une atmosphère baignée d’insalubrité.

C’est donc un disque à deux visages, avec une façade paisible voire gentillette, mais avec un fond autrement plus complexe et malsain. Outre l’usage régulier d’un violon sinueux, on peut noter des percussions électroniquement conçues qui vont marteler la mélodie de manière presque métallique (mais des boites à rythme plus « traditionnelles » y sont aussi présentes, dans un ensemble quasi-ésotérique). Il s'agit donc d'une musique tournant principalement autour des éléments rythmiques, mais aussi souvent sur les claviers de Phil Knight, ainsi que sur les performances vocales du "prophète". Les titres passent d'une tendance ordonnée à un fonctionnement déstructuré incontrôlable. Ça et là, un accordéon fait son apparition, des rires d'enfants inquiétants surgissent d'on se sait où, les murmures de conversations s'envolent et tout se noie dans une finalité chaotique brutale. Les émotions transmises varient aussi beaucoup. Parfois la musique s'empreint d'une tristesse larmoyante avant de se muer en un sentiment de victoire écrasante... Les cordes du violon y sont pour beaucoup dans les changements d'ambiance, mais le son doucereux qu'il créé est éventré tôt ou tard par le reste de l'instrumentation.

Au vu de ce qui précède, l'on pourrait s'imaginer - à tort - que l'album entier est composé d'une abstraction expérimentale. Cependant, comme il l'a déjà été précisé, il est très abordable, car y sont employés des moyens standards de composition. Sans s'étendre sur le sujet, les mélodies sont inspirées de musiques traditionnelles variées, et les séquences électroniques sont soignées et n'engluent pas le plaisir de l'écoute. En revanche, de nombreux passages sont franchement dérangeants et évoquent un vice indescriptible. La fusion de l'ensemble de ces éléments fait toute la magie et tout l'intérêt du groupe. Ils savent se diversifier à un point appréciable, et possèdent une large capacité d'adaptation selon leurs besoins, voguant d'un genre à l'autre sans renier leur appartenance au mouvement industriel. La violence calme demeure l'une de leurs spécialités les plus surprenantes. A écouter, à réécouter et à faire passer entre toutes les mains.

Note : ****


Liste des morceaux :

1. Casting The Runes
2. A Strychnine Kiss
3. Laguna Beach
4. The Gallery
5. Neon Mariners
6. True Love
7. The Peculiar Fun Fair
8. Waiting For The Cloud
9. Cloud Zero
10. Under Glass
11. The Light In My Little Girl's Eyes
12. The Plasma Twins

vendredi 17 septembre 2010

A TRIBE CALLED QUEST : THE LOW END THEORY


New-Yorkais casquetteux et au T-shirt trop large, les membres de "A tribe called quest" ont néanmoins du talent. On tombe ici dans l'un des grands stéréotypes du Hip-Hop, mais le disque n'en n'est pas moins excellent. Ce groupe des années 1990 ("The Low End Theory" est leur deuxième album) a une conception bien précise de ce genre très controversé. Ainsi, la deuxième entité remerciée après Dieu est composée de tous les "vrais" groupes de Hip-Hop. Ils n'observent en effet pas d'un bon oeil les dérivations de ce style lors de cette période, et préfèrent demeurer des "vieux de la vieille". Ils s'en tiennent aux méthodes des premiers rappeurs... Telle est la ligne de conduite de ces compères qui vont nous en faire voir de toutes les couleurs (principalement du rouge et du vert...).

L'album commence très fort par "Excursions", l'un des morceaux les plus impressionnants du disque. Une ligne de basse à faire bander un rocher, une boîte à rythmes soigneusement dosée, et la machine est mise en route... L'on peut considérer deux parties dans le disque. Tout d'abord, une première moitié pleine de punch, réalisée avec une main de maître énergique, mais qui sera suivie d'une seconde, plus posée sans baisser de niveau. Les syllabes presque chantées s'enchaînent fluidement, à la fois marquantes et relâchées, toujours sur fond de basse aphrodisiaque et de battement tonique électronique... Finalement, l'ensemble est entraînant, bien géré et dense, sans être lancinant - un problème récurrent dans le milieu. Des extraits à l'orgue électronique, ou instrument avoisinant, viennent éclaircir le tableau, relativement sombre et résolument affirmé. Les jeunes rappeurs, supporters du "stop the violence movement", content dans une volée de plaisir les difficultés de beaucoup de banlieusards - Américains, en particulier - à survivre dans une société qui ne leur accorde pas forcément toutes leurs chances... Ce sont ainsi des paroles très sociologiques qui dénoncent certaines violences actuelles trop souvent impunies au sein de beaucoup de banlieues, du racket au viol, en passant par la corruption. On reste ainsi dans une thématique classique des débuts du Hip-Hop (mais aussi, dans une certaine mesure, du Hip-Hop actuel), qui dénote une fois encore de la volonté du groupe de demeurer dans l'esprit originel.

Si A tribe Called Quest excelle dans son art, c'est en bonne partie grâce à une excellente utilisation des "samples", de bandes pré-enregistrées ou empruntées à d'autres artistes passées dans le morceau. L'usage de ce procédé peut tourner assez rapidement au vinaigre en cas d'abus, de mauvais choix ou de découpage brouillon au montage, ce qui justifie un soin tout particulier à son application. Mais nos adeptes du Hip-Hop n'ont pas ces difficultés. Ils se servent de samples avec une parfaite minutie pour ajouter de la couleur à leur musique. Ils permettent à leurs créations de monter encore d'un cran. Ainsi, régulièrement, des extraits de saxophone, de clavier ou tout simplement de voix surgissent pour embellir les morceaux. Etonnament, ils en imprègnent certains d'une touche très "jazzy", ce qui modifie radicalement l'aspect initial du titre. Parfois encore, ces mêmes samples donnent une allure rétro à l'ensemble. Ils sont donc utilisés avec professionnalisme et diversité, ce qui n'est pas donné d'avance dans ce genre de composition. Il va de soi que le groupe ne s'en sert pas dans le cadre d'une improvisation. Si improvisation il y a, elle restera strictement vocale.

Un très bon disque, donc, pour les amateurs de Hip-Hop et pour les "débutants", car il demeure très accessible à un audimat inhabitué à ce style. Il demeure une référence pour le groupe et le genre entier, un véritable incontournable en termes de qualité et de plaisir. Une musique rythmée rafraîchissante, pour conclure, qui ne manquera pas de séduire les plus sceptiques. A noter que dans le milieu, les musiciens ne s'adonnent en général pas aux traditionnelles envolées au LSD, préférant à cette drogue les effets plus standards du shit qui permet, lui, de rester sur terre. Enfin, dans une certaine mesure... A écouter, et à réécouter !

Note : ****1/2

Liste des morceaux :

1. Excursions (3.53)
2. Buggin'out (3.38)
3. Rap Promoter (2.19)
4. Butter (3.39)
5. Verses From The Abstract (3.59)
6. Show Business (3.53)
7. Vibes And Stuff (4.18)
8. The Infamous Date Rape (2.54)
9. Check The Rhime (3.36)
10. Everything Is Fair (2.59)
11. Jazz (We've Got) (4.09)
12. Skypager (2.13)
13. What ? (2.29)
14. Scenario (4.10)

samedi 11 septembre 2010

DEATH IN JUNE : ABANDON TRACKS!




L'un des groupes les plus éminents du neo-folk (ou Dark Folk, selon les écoles de pensée) est Death in June - DIJ pour les intimes. Bien que la bande ne se soit pas prononcée à ce sujet, l'on peut imaginer, étant donné ses positions politiques, que le nom est une habile référence aux assassinats des SA par leur récents confrères SS à l'issue de la Nuit de Cristal, quelques heures particulièrement sanglantes en Juin. Death in June se revendique nationaliste, ainsi leurs pochettes sont régulièrement marquées d'outils militaires - avec une affection toute particulière pour les chars d'assaut - et le costume du chanteur Douglas, traditionnellement composé d'un treilli à capuche, de lourdes et noires bottes de cuir, ainsi que d'un masque nacré qui n'exprime pas une joyeuseté significative... Bref, le groupe exprime clairement ses opinions, y compris à travers une citation plutôt longue de Yukio Mishima, auteur et politicien nippon aux idées et positions similaires notamment connu pour "La musique", un ouvrage révélateur sur la société de son époque, à l'instar du reste de son oeuvre. A noter qu'il s'est suicidé devants les médias par la méthode barbare mais néanmoins traditionnelle au Japon : le Seppuku. DIJ fait ainsi ressortir un personnage aux opinions fortes, et il ne serait pas impossible que Douglas s'assimile à lui à travers sa musique.

Abandon Tracks. Un nom explicite : les versions des morceaux issus de ce disque n'étaient pas de nature à apparaître en album, concept qui suggère une certaine continuité entre les différentes pistes. Heureusement, nous pouvons à présent en bénéficier grâce à cette compilation, qui regroupe des extraits musicaux de tous azimuts. Ainsi le CD commence avec un morceau instrumental très clair, sans brouillage ni friture, pour enchaîner avec un titre plus expérimental, calquant DIJ sur fond de sample d'opéra ou de musiques culturelles traditionnelles. On observe de nouveau le talent du groupe à exécuter une musique simple dans les règles de l'art suivie d'un bordel tonal fascinant... On a droit à la voix grave, veloutée et surtout agréable de Douglas nature... puis modifiée grâce aux merveilleux accessoires que l'on est aujourd'hui en mesure de fabriquer. Voici un mélange étonnant d'instruments modernes confondus aux outils acoustiques simples, guitare sèche par exemple... Le résultat n'est cependant pas détonnant, car il conserve une certaine douceur, rejetant toute forme de brusquerie, réduisant considérablement jusqu'aux percussions, réelles ou virtuelles, et si une boîte à rythmes vient parfois troubler le calme de DIJ, ce n'est qu'une onde temporaire qui s'estompera rapidement. La ligne sonore ne se complexifie que rarement, et on garde finalement une musique ethérée, qui ne surprend pas par de soudaines violences incongrues dans le contexte, mais par un son étudié et épuré.

Cependant, en tant que compilation, Abandon Tracks comporte quelques problèmes qu'il nous faut à présent évoquer. En effet, l'usage de matériel électronique ne se légitime pas systématiquement. Ainsi, il arrive que le morceau soit tellement éthéré à force de bidouillage non justifié qu'il en devienne incompréhensible musicalement parlant. Il s'agit du même effet que ferait une longue phrase ampoulée dans un écrit : il se peut que le lecteur finisse par oublier et confondre le sujet et d'autres compléments à force d'enluminures. La sensation est ici similaire : ces "enluminures" musicales paraissent superflues et inutiles, gâchant la simplicité du morceau, qui en faisait sa beauté à l'origine. Mais il ne faut pas non plus généraliser, cette difficulté auditive n'est que quelques fois rencontrée dans le disque. Quelques titres comportent un autre problème, à savoir le revirement du compositeur dans un domaine purement expérimental, voire bruitiste, dans lequel Death in June n'a pas toujours sa place. Le plaisir disparaît alors pour laisser place à une pénible sensation d'agressivité auditive, nuisant au titre de façon significative...

Si tout n'est pas doré dans cette compilation, elle n'en demeure pas moins un excellent recueil musical au nom de Douglas, dont les performances artistiques font probablement frémir bon nombre de groupes de neo-folk ou d'indus de par la réflexion et la beauté simple injectées dans les différents morceaux, qui s'agglutinent sans aucune suite logique pour former un amas très Death in Junien qui fera le plus grand plaisir des fans et des collectionneurs du genre. A ne pas rejeter, donc, et à apprécier comme le reste des créations du musicien.

Note : ***1/2

Liste des morceaux :

1. The Concrete Fountain
2. The Only Good Neighbor
3. 13 Years Of Carrion
4. Burn Again
5. My Black Diaries
6. Punishment Initiation
7. We Said Destroy
8. Europa Rising
9. Rocking Horse Night
10. Death Of A Man
11. Passion! Power!! Purge!!!
12. My Black Diary
13. In Sacrilege
14. Many Enemies Bring Much Honour
15. Unconditional Armistice
16. Europa : The Gates Of Heaven And Hell