mercredi 9 février 2011

MATT ELLIOTT : DRINKING SONGS


Dans la longue liste des artistes dépressifs et déprimants, Matt Elliott figure très certainement dans la décade de tête. Musicien Folk des années 2000, il se distingue par une patte musicale reconnaissable entre toutes, gorgée de tristesse. Bon, pour faire court, c'est pas le genre de truc qu'on se met pour se fendre la pêche. Aussi déconseillé le matin, sauf si vous vous rendez à un enterrement peu après. De plus, ce disque est à proscrire si vous avez tendance à vous endormir avec une bouteille de pinard dans les bras, même votre médecin vous le fera remarquer. Ces recommandations faites, nous pouvons commencer à décortiquer Drinking Songs, perle des années 2000.

D'entrée de jeu, les premiers arpèges sont annonciateurs d'une musique qui ferait se pendre une corde elle-même. Le thème du suicide est omniprésent, rendu particulièrement glauque par des mélodies qui colleraient parfaitement à l'ambiance des bistrots de Berlin-Est durant la Guerre Froide. Elles sont teintes d'un désespoir amer piqué de tristesse. Les enchaînements d'accords au piano, presque chauds dans un premier temps, finissent par se ternir, se dénuder pour laisser place à un souffle glacé et ardent, faussement suave en apparence mais âcre en vérité. La guitare, elle, continue, imperturbable, sans tenir compte de la profonde rancœur qui l'enveloppe. Rien n'adoucit cette musique obscure, si ce n'est la voix brûlante de Matt Elliott, presque fiévreuse, qui sucre légèrement la détresse des morceaux.

Rien de très joyeux, vous l'aurez compris, mais les sensations qui naissent de ce volume sont dues à un mélange bien dosé, qui a permis la création d'un thème musical repris dans tout le disque avec différentes variations. Cependant, rassurez-vous, il est loin d'être monotone. Simplement, il martèle inlassablement à coups de désespoir mesuré ses mélodies. Tous les moyens sont alors bons : violons découragés et sinueux, ensembles vocaux dignes de l'animation d'un mausolée, arpèges rigoureusement exécutés et un piano en arrière plan mais pourtant très présent, qui vient finaliser le cocon fantomatique de la composition.

On peut noter les passages très calmes du début du dernier morceau, qui font s'émerger d'une longue torpeur vos oreilles délicates qui prévoient déjà de se passer la corde autour du lobe... Ils se distinguent par leur nature posée, aléatoire et discrète, et vont plonger dans une musique de plus en plus rythmique avant de sombrer progressivement dans le bruitisme, dans un chaos grinçant et cafouilleux, pour chuter définitivement dans le nuage blanc et noir caractéristique des écrans hors-service. C'est alors une extase de sons provenant de toutes parts, suivie d'un piano de plus en plus anarchique et d'un lointain reste des mélodies de Matt Elliott, le tout dans une cohésion extraordinaire, malgré la confusion de l'enveloppe sonore.

Un superbe album, donc, déprimant jusqu'à l'os, et qui restera probablement longtemps dans les mémoires. En revanche, coupez le son quand vous passez sur un pont. On ne sait jamais quelle idée pourrait vous passer par la tête...


Liste des morceaux :

1. C.F. Bundy
2. Trying to Explain
3. The Guilty Party
4. What's Wrong
5. The Kursk
6. What the Fuck am I Doing on this Battlefield ?
7. A Waste of Blood
8. The Maid we Messed

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