vendredi 16 avril 2010

JOHN ZORN : ASTRONOME


L'on pouvait redouter cette union. D'un côté, John Zorn, célèbre compositeur de jazz expérimental, de l'autre, Mike Patton, chanteur fameux de Faith No More et de Fantomas. Nos deux rigolos se sont donc assemblés pour boucler un disque... astronomique. Le carnage se déroule en trois actes, d'une moyenne de quinze minute chacun, et d'une remarquable violence. A côté, Sepultura fait effet d'un enfant de chœur... Si l'on récapitule, la danse est menée par un chanteur fou - expert en sons buccaux (rappelez-vous... c'est lui qui faisait les "voix" des zombies dans "Je suis une légende"...), un claviériste saxophoniste compositeur non moins cinglé, qui prend le plus grand plaisir à jouer sur des contrastes de violence, et d'autres musiciens, les figurants dans cette affaire, qui paraissent voir ce disque comme un exutoire sans limites... Des réjouissances en perspective !

Des accords brutaux à la gratte, un rythme diablement fou à la batterie en petite intro, et le festival peut commencer... Des aboiements stridents inhumains surgissent des profondeurs, puis l'ensemble soudain se calme. Les percussions reprennent de l'ampleur, et c'est repartit pour un tour ! Les artistes mettent en scène des sons démoniaques, qu'ils soient produit par le Général de Fantomas ou par des synthétiseurs saturés. Les autres instruments passent par tellement de pédales d'effet qu'on en a des difficultés à distinguer leur sonorité d'origine. Mais qu'importe, tout cela est dans l'esprit des musiciens et de la composition bordélique du disque. L'atmosphère s'emplit d'un capharnaüm sonore effrayant, tout droit sortit de l'enfer, ou plutôt des cerveaux étranges de nos deux compères... Mais bon, quiconque connait l'œuvre de chacun des protagonistes peut s'attendre à un tel résultat. Il leur était déjà arrivé de coopérer, mais jusqu'ici leurs productions ressemblaient moins à un cirque infernal que dans Astronome.

C'est d'ailleurs ce que l'on peut leur reprocher pour cet album. Trop d'éléments, et de violence variable de surcroît, nous parviennent en même temps. De plus, il est difficile de comprendre l'intérêt musical de certains bruits de bouches de Mike Patton, qui font plus penser à un extrait de cartoon américain - que vous pourrez admirer sur votre chaîne favorite - qu'à une tonalité volontaire appuyant l'intérêt de l'album. Autant ce n'était absolument pas dérangeant dans le cadre de Mr. Bungle, autant cet élément est plus dur à apprécier dans Astronome. Surtout quand ils entrent en alternance avec des hurlements qui terroriseraient tout chanteur correct de Death Metal. Mais il surprendra toujours un large public par la variété et la qualité générale de ses créations. En tout cas, John Zorn et lui ont du être attirés l'un vers l'autre ainsi que le feraient deux aimants de deux mètres de large...

Mais le plus surprenant est encore à venir (sisi, je vous assure). Figurez-vous que Astronome est construit sur la même base qu'un... opéra ! En effet, on a pu noter la répartition des morceaux en trois actes, et un même caractère émerge des différentes pistes. Ces-dernières sont d'ailleurs clairement teintées d'ésotérisme, voire d'obscurantisme, comme peuvent nous le confirmer les cris de monstres très lovecraftiens effectués par un démon complètement pattoné... Mais il faudra quand même plus d'imagination pour accepter Astronome en tant qu'opéra. Il fallait être gonflé pour qualifié ainsi un tel fouillis musical, à la limite de la musique bruitiste. Heureusement, John Zorn l'est à bloc, et Mike Patton n'a rien à lui envier de ce point de vue... John Zorn donne donc à cet... opéra, faute de mieux, une thématique clairement dantesque avec un univers peuplé de démons et d'autres êtres absurdes ou inimaginables, on l'aura assez répété. Ce qui colle parfaitement avec la saturation névrosée des divers instruments.

Astronome est sortit en 2006, quelques mois à peine la sortie de Moonchild - une autre association entre John Zorn et Mike Patton. Il a donc pu décevoir les fans, après la réussite formidable de Moonchild. Astronome peut donc laisser ses auditeurs sur leur faim, inassouvie après tant d'espoir. De plus, l'espace temporel restreint entre les deux albums peu faire douter du soin apporté par John Zorn à la composition d'Astronome. Peut-être a-t-il laissé une plus grande part à l'improvisation, comptant sur les performances de Mike patton et de l'ex-bassiste de Mr. Bungle, et ce au détriment de l'organisation... Mais ne crachons tout de même pas sur cet album, qui demeure... astronomique.

Note : **1/2

Liste des morceaux :

1. Act One : A Secluded Clearing In The Woods; A Single Bed In A Small Room; The Innermost Chapel Of A Secret Temple (14.34)

2. Act Two : A Mediaeval Laboratory; In The Magic Circle (17.02)

3. Act Three : A Barren Plain At Midnight; An Unnamed Location (12.44)

Du même artiste, vous aimerez :

- Moonchild (2006).

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